De fourbes marionnettes

À Naples, deux vieillards rentrés de voyage forment des projets de mariage pour leurs deux fils, mais en leur absence le premier s’est marié en secret et le second est tombé amoureux d’une Égyptienne...

Lorsque l'on dit de cette pièce qu'elle est jouée par des marionnettes, ce n'est pas tout à fait exact, c'est même bien plus fourbe : il y a aussi un comédien, mais c'est lui qui manipule les 8 marionnettes ! Ce qui est logique quand on repense à cette histoire imaginée par Molière et jouée pour la première fois le 24 mai 1671 à Paris. Il s'agit en effet avec Scapin d'un valet vengeur, qui se met à comploter, à manipuler les destins, en somme à tirer les ficelles... Le recours au théâtre de marionnettes est donc si naturel, mais encore fallait-il y penser !

Mais là où cette métaphore de la manipulation devient une prouesse, c'est que le comédien Jean Sclavis (né à Lyon) ne se contente pas d'interpréter Scapin : il manipule également huit marionnettes. Lesquelles, pour couronner le tout, ne sont pas des jouets : leur créatrice, Emilie Valantin (Lyonnaise, fondatrice du Théâtre du Fust à Montélimar en 1975, mandatée en 2008 par la Ville de Lyon comme directrice artistique du Bicentenaire de Guignol) les a faites à proches de la taille humaine (1m30). Elles sont donc manipulées à vue par Scapin lui-même, qui alterne affirmation de sa présence quand il est Scapin, discrétion quand il est manipulateur...

Même si leur construction a veillé à ce que ces marionnettes puissent marcher, s’asseoir et s’agenouiller sans mécanisme apparent, on imagine la maîtrise technique qu'il faut pour les scènes à 2 voire 3 personnages ! Mais au vu des critiques, il faut croire qu'au final le spectacteur assite à un spectacle qui n'est pas cousu de ficelles blanches : le Théâtre du Fust revisite avec brio ce classique de Molière, filant ainsi la métaphore du serviteur qui tire les ficelles et exhibe l’inconsistance, la naïveté et la rouerie de chacun.