Kernel, suivi de Percut
Alors que la fusion et l’éclatement du trio s'enchaînent, la tension et la clarté du mouvement tranchent la matière chorégraphique et d’étonnants points de rencontre entre les interprètes surgissent, comme venus de nulle part. Ces multiples coïncidences, échos et rebonds des corps confèrent à Kernel une musicalité tout à fait singulière. Ils en font un opus vif, hypnotique et fascinant. Soutenue par la simplicité revendiquée de son cadre scénographique et dramaturgique, Kernel génère un chaos organisé, totalement intégré par les interprètes Jazz Barbé, Léna Pinon Lang et Clément Olivier.
Percut est née entre deux confinements, et peut-être entre deux époques. Une ère de certitudes, où nous considérons la prospérité comme un dû, et un temps de l’incertain, où toute vision programmée est mise en déroute, et où les rapports s’inversent d’un seul mouvement. Ce contexte de bascule mondiale, Percut s’attèle à le retranscrire avec une paradoxale ténacité chorégraphique. Accompagné de six interprètes, Pierre Pontvianne chemine avec eux jusqu’au point névralgique de sa recherche, qui deviendra la pièce toute entière. En chœur, les danseurs s’accompagnent dans une saillie de mots criés, exclamative et puissamment synchrone, mettant en évidence une science du collectif à l'œuvre. La question du souffle est centrale, les corps sont ici physiquement à l’épreuve. Les danseurs crient à en perdre haleine. On comprend ce qu’invoquer, exprimer, adresser, alerter… fait au corps. Dans le flot quotidien des communications et des messages contradictoires, Percut recompose un sens. Via des mots et bribes de mots, il fait table rase du mouvement, et se fait le reflet de nos paralysies sociales au propre comme au figuré. Dans Percut, langage et cri sont les matières qui permettent au corps de se déployer au-delà de lui-même.
Publié le 15/08/2022